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Dîner-débat: les relations Japon-Afrique: quelles
28 août 2014
L’attractivité réciproque entre l’Asie et l’Afrique est clairement démontrée par les chiffres de la Banque mondiale et d’autres études. Cela faisait huit ans qu’un Premier ministre japonais n’avait pas « posé les pieds » en Afrique. C’est dire si la visite de Shinzo Abe, en janvier en Côte d’Ivoire, au Mozambique et en l’Ethiopie est historique. Tokyo ne compte que 32 représentations diplomatiques sur le continent, contre 49 pour Pékin. Les échanges entre la Chine et l’Afrique avoisinent les 130 milliards de dollars contre à peine 25 milliards pour le commerce nippo-africain. Devant un tel dynamisme, porteur de mutations structurelles, une réflexion commune est nécessaire pour prévenir l’évolution ultérieure. La question qui demeure pour nous aujourd’hui est : qu’est-ce qui émerge réellement sous nos yeux ? De quel développement s’agit-il au-delà de performances d’ordre économique, social, politique, international, interculturel, interreligieux ?
L’IAM a une police de travail dans une grande variété de domaines, y compris les questions relatives aux relations Afrique-Asie pour mieux acquérir une grille de lecture pertinente et opérationnelle sur l’Afrique d’aujourd’hui et comprendre la complexité et les dynamiques africaines, tant sur les questions liées à l’émergence économique que sur les interactions entre les cultures. C’est pourquoi il nous apparaît nécessaire d’entamer ici une réflexion sur les nouvelles donnes, notamment les partenariats profonds avec l’Asie.
Le continent connaît en effet un manque sérieux de compétences dans des domaines cruciaux à l’atteinte de l’objectif de transformation structurelle. Le fait qu’un nombre important d’ingénieurs et de gradués des facultés de science sont au chômage en Afrique souligne les différents aspects (y compris la lenteur du processus de transformation structurelle) de l’inadéquation entre la demande et l’offre de compétences sur le continent.
La prolifération, depuis 1950, des institutions d’enseignement supérieur et de groupes de réflexion dédiés aux questions du développement en Afrique n’a pas aidé à réduire le déficit des compétences sur le continent. Elle n’a pas non plus amélioré l’accès de la main d’oeuvre à l’emploi. La grande proportion de diplômés d’universités est constituée de licenciés en sciences humaines et sociales alors que celles d’étudiants qui s’inscrivent en sciences, technologies, ingénierie et mathématiques représente moins de 25% des étudiants inscrits. Les dépenses intérieures brutes de recherche et développement demeurent très basses en Afrique. Elles sont principalement effectuées par le secteur public au profit de l’agriculture et, en général, très peu de cas est fait des instituts de recherche industrielle. Malheureusement, ces institutions de recherche publiques sont souvent insuffisamment développées, ne disposent pas de ressources adéquates, et ont peu de liens avec le secteur privé.
Tokyo préfère aujourd’hui se concentrer sur les pays stables et à forte croissance tels que le Sénégal, la Tanzanie ou le Ghana. Quel partenariat pour investir dans l’enseignement, de la recherche- développement et dans la création d’instituts de formation technique étroitement liés à l’industrie? Le déficit qu’accuse l’Afrique dans ce domaine constitue un handicap sérieux pour la valorisation de ses ressources. Les échanges d’expériences et de transfert de technologie et de savoir-faire doivent figurer en bonne place dans le partenariat avec l’Amérique. Le partenariat pourrait inclure des programmes de formation et de bourses d’études, des interactions entre établissements d’enseignement supérieur, de formation professionnelle et de recherche, ainsi qu’un soutien à la création de centres d’excellence et à l’université panafricaine.
Sans perdre de vue que l’Afrique entend se transformer à l’ère de l’évolution rapide de la technologie et de l’innovation à l’échelle mondiale, poser ainsi la question sous un angle qui peut paraître utilitariste ne nie en rien la dimension culturelle, identitaire, profonde que revêt le partenariat avec les universités japonaises.
- Comment construire des liens durables soutenus par des programmes innovants de recherche et de formation et par des formes de partenariats interdisciplinaires dans le domaine des sciences et sciences sociales ?
- Comment l’Afrique peut développer son dispositif de mobilité étudiante et enseignante intrafricaine et internationale ?
- Comment repenser l’articulation entre l’enseignement secondaire et l’enseignement supérieur au regard de l’expérience asiatique ?
- Comment renforcer l’amitié entre le peuple asiatique et le peuple de l’Afrique et approfondir le partenariat global stratégique entre les deux partenaires?
- Comment financer un projet de recherche sur le commerce des matières premières en collaboration avec des universités japonaises et six universités catholiques africaines?
Autant de questions débattues lors des riches échanges de ce dîner-débat.